Last site update 17/09/2021

To content | To menu | To search

Une Europe pour la solidarité dans la liberté

Nous som­mes à un mois jour pour jour de la réu­nion du Con­grès à Ver­sailles, date à laquelle il sera demandé aux par­le­men­tai­res, dépu­tés et séna­teurs tous réu­nis, de modi­fier la cons­ti­tu­tion afin d’auto­ri­ser par la suite le vote d’une loi rati­fiant le TCE ver­sion 2007 ou si l’on pré­fère, le Traité de Lis­bonne. Il y a de bon­nes rai­sons de pen­ser que la modi­fi­ca­tion de la cons­ti­tu­tion vau­dra pour rati­fi­ca­tion du traité. Il serait en effet très sur­pre­nant que les mêmes par­le­men­tai­res se con­tre­di­sent d’autant que les deux cham­bres sont majo­ri­tai­re­ment de la même famille poli­ti­que que le pré­si­dent qui leur sou­met la pro­cé­dure.

Cette situa­tion, ce retour­ne­ment de situa­tion com­plet même, com­pa­rée à celle du 29 mai 2005 au soir qui, tout le monde s’en rap­pelle, avait opposé un NON caté­go­ri­que au TCE 2005 porté, en France par une majo­rité de 54% et une forte par­ti­ci­pa­tion mais aussi au Pays-Bas, se révèle en con­tra­dic­tion par­faite d’avec le fameux « coup d’arrêt » que de nom­breux res­pon­sa­bles poli­ti­ques, syn­di­caux et asso­cia­tifs avaient porté après une vic­toire jugées alors comme his­to­ri­que. L’évi­dence c’est qu’il n’en est rien….

Quoiqu’on ait pu en dire en effet, les ins­ti­tu­tions euro­péen­nes n’ont jamais cessé de fonc­tion­ner et la pro­cé­dure en cours de rati­fi­ca­tion du Traité de Lis­bonne/TCE 2007 repre­nant sans jamais faillir le con­tenu du TCE rejeté  - comme nous avons essayé de le démon­trer dans un billet pré­cé­dent - sont la preuve patente que s’il y a eu un coup d’arrêt, c’est au coup d’arrêt lui-même qu’il a été appli­qué, c’est à dire à l’acte démo­cra­ti­que le plus direct qu’est un réfé­ren­dum. Ce cons­tat est à la fois celui d’une ana­lyse tota­le­ment erro­née de la situa­tion, à tel point que de sérieu­ses ques­tions devront être posées, mais c’est aussi et sur­tout celui d’un véri­ta­ble pro­blème opposé au régime répu­bli­cain et la démo­cra­tie du pays.

L’expres­sion selon laquelle il y aurait eu un «coup d’arrêt», sous-entendu défi­ni­tif, n’a pas été por­tée par tous les citoyens, mili­tants et res­pon­sa­bles qui ont fait la cam­pa­gne du NON à gau­che comme à droite. On pour­rait en effet essayer de démon­trer que ceux qui, dans le NON dit de gau­che notam­ment, il y avait comme on va le voir d’authen­ti­ques pro-euro­péens qui avaient suf­fi­sam­ment d’argu­ments con­tre le texte pour le refu­ser en cons­cience mais n’avaient en revan­che aucune rai­son de pen­ser à un «coup d’arrêt» encore moins un coup d’arrêt défi­ni­tif à l’Europe.

Il a été dit en effet main­tes fois, fort jus­te­ment, que le NON comme le OUI étaient com­po­si­tes ce qui ren­dait dif­fi­cile la lec­ture sérieuse des résul­tats et l’affai­blis­sait même d’une cer­taine manière. Le OUI comme le NON étaient com­po­sés, dans des pro­por­tions varia­bles, de pro de gau­che comme de droite et d’anti, sou­vent natio­na­lis­tes ou sou­ve­rai­nis­tes, là aussi de droite et de gau­che. Ce n’est pas le moment d’en faire la démons­tra­tion mais on peut au moins émet­tre l’hypo­thèse trou­blante que c’est bien la com­po­sante sou­ve­rai­niste et natio­na­liste du NON, qui se pla­çait alors à gau­che mais au fond droi­tière ou « droi­ti­sante », qui a été por­teuse du fameux « coup d’arrêt » et du dis­cours tota­le­ment erroné sur la situa­tion qui allait de pair.

L’urgence n’est cepen­dant pas là. Puisqu’une cer­taine con­cep­tion de l’Europe est en mar­che et qu’à l’évi­dence elle cher­che à se con­cré­ti­ser, coûte que coûte, en dépit du refus exprimé par réfé­ren­dum en 2005, il appa­raît impor­tant aussi de dire, au nom même de la démo­cra­tie en train d’être bafouée, qu’au fond il n’y a pas de rai­son nou­velle et sérieuse d’accep­ter aujourd’hui un texte refusé mal­gré un titre et un aspect dif­fé­rent et sur le fond iden­ti­que. Le con­tenu est le même et à cer­tains égards il est même aggravé.

Il est impor­tant enfin de mon­trer que tous les argu­ments notam­ment de fond con­tre le TCE de 2005, tota­le­ment assu­més par des mil­lions de citoyens, n’étaient pas for­cé­ment por­tés, avec des arrière-pen­sées, con­tre toute forme d’orga­ni­sa­tion de l’Europe ou tout sim­ple­ment anti-europe.

L’extrait du dia­lo­gue ci-des­sous entre Pas­cale Fou­rier, ani­ma­trice de l’émis­sion « Des sous… et des hom­mes », et Raoul-Marc Jen­nar , en date du 3 mai 2005 inti­tu­lée «Europe ou la tra­hi­son des éli­tes ?». Vous pou­vez écou­ter ou lire l’inté­gra­lité de cette émis­sion dis­po­ni­ble sur son site inter­net.

Nous avons choisi, à des­sein, de don­ner un titre dif­fé­rent à l’extrait que nous vous pro­po­sons ci-des­sous.


Extraits : Une Europe pour la soli­da­rité dans la liberté


P.F. : Qu’est-ce que vous pou­vez me don­ner comme rai­son d’être euro­péenne, de me sen­tir euro­péenne ?

Raoul-Marc Jen­nar : Moi je pense qu’il y a un quel­que chose d’impor­tant qui est com­mun aux peu­ples d’Europe qui n’a rien à voir avec la cons­truc­tion euro­péenne, - ce qu’on appelle la « cons­truc­tion euro­péenne », c’est-à-dire le pro­ces­sus poli­ti­que qui est en cours depuis 1957 depuis le traité de Rome - et qui relève plu­tôt d’une vision de société, d’un modèle de société, peut-être même d’une civi­li­sa­tion euro­péenne qui se dis­tin­gue assez for­te­ment de ce qui se fait Outre-Atlan­ti­que comme tout autant for­te­ment sinon davan­tage encore de ce qui a été tenté dans le modèle sovié­ti­que. Et j’ai trouvé ça, moi, dans un tra­vail que j’ai fait sur l’his­toire des cons­ti­tu­tions en Europe.

C’est en Europe, et nulle part ailleurs dans le monde, qu’au XVIIIème siè­cle, des gens, de tous Etats, ont for­mulé deux sor­tes d’exi­gen­ces. Tout d’abord, des liber­tés indi­vi­duel­les : on était sous l’Ancien Régime par­tout, on était dans un régime des­po­ti­que qui n’assu­rait pas les liber­tés indi­vi­duel­les mini­ma­les, donc il y a tout un cor­pus de liber­tés que l’on a retrouvé, par exem­ple, et avec toute la solen­nité du texte, dans la Décla­ra­tion des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789. Mais on a sou­vent oublié, trop sou­vent d’ailleurs, qu’en même temps - il suf­fit de relire (c’est publié) les cahiers de doléan­ces, les fameux cahiers de doléan­ces adres­sés aux Etats Géné­raux con­vo­qués par Louis XVI; mais il faut aller aussi en Ita­lie par exem­ple (l’Ita­lie n’exis­tait pas encore comme telle, mais il y avait des répu­bli­ques ita­lien­nes) ; les Pays-Bas n’exis­taient pas mais il y a eu un moment une Répu­bli­que batave; la Bel­gi­que n’exis­tait pas mais il y avait à Liège et en Bra­bant des mou­ve­ments révo­lu­tion­nai­res, en Alle­ma­gne aussi - et qu’est-ce qu’on trouve dans tous les tex­tes dont on va retrou­ver, par exem­ple, la trace dans la Cons­ti­tu­tion de l’An I de la Répu­bli­que, de la Cons­ti­tu­tion de 1793 : des droits col­lec­tifs. Moi j’ai trouvé dans ces tex­tes, mais je vais le dire dans le fran­çais d’aujourd’hui parce que ce n’était pas écrit comme ça, évi­dem­ment, maisdes atten­tes pour assu­rer le loge­ment, des atten­tes pour qu’il y ait un salaire mini­mum garanti, encore une fois ce n’était pas for­mulé comme ça, mais qu’il y ait une sorte d’assu­rance, de cer­ti­tude que, au moins, tous ceux qui tra­vaillent tou­che­raient un mini­mum con­venu; des atten­tes pour une sorte de pen­sion de retraite, bref, l’évo­ca­tion de toute une série de droits sociaux, de droits col­lec­tifs. Et ça, pour moi, c’est tout aussi impor­tant que les droits indi­vi­duels, mais c’est la tra­duc­tion d’un modèle de société parce que les droits col­lec­tifs, c’est la soli­da­rité. Pour que ces droits puis­sent être exer­cés, il faut des méca­nis­mes par les­quels on mutua­liste les coûts, c’est ce qu’on appelle aujourd’hui la redis­tri­bu­tion.

Alors c’est ça, pour moi, le pro­jet euro­péen, c’est ça, ce qui fait l’essence de l’Europe. C’est que, depuis 200 ans, on s’emploie à cons­truire un modèle de société où on orga­nise la soli­da­rité dans la liberté.





Document(s) attaché(s) :

  1. no attachment




Éric Jousse

Author: Éric Jousse

Stay in touch with the latest news and subscribe to the RSS Feed about this category

Comments (0)

Comments are closed



You might also like

EUROZONE-GREECE/

Grèce : le catalogue des horreurs

Surprise dans les pages de Netoyens (sauf quelques liens sur un site externe) de ne rien voir sur LE sujet du moment : la mise à mort de l’un des berceaux de notre civilisation, la patrie d’Aristote, Socrate, Platon, la patrie de la démocratie. Le génocide de tout un peuple pourtant si généreux - je ne parle pas des armateurs et politicards clientélistes bien-sûr mais de Maria, Nicki, Costas, Helena, Germana, Zacharias, Stavros, Yannis, et d’autres encore. De ces personnes comme vous et moi, rencontrées au cours d’un voyage que j’aurais voulu plus long, plus intense, plus proche encore de chacun d’eux. [Crédit photo spiegle.de] 1338

Continue reading

francedanslemonde.png

Attentats parisiens : la pseudo absence des femmes et l'impensé social de ce qu'elles donnent au monde commun

Ce texte est dédié en tout premier à deux femmes : Djamila Boupacha et Fatima Elayoubi[1] Mes pensées vont vers elles et vers toutes les femmes qui prennent soin des enfants. 171

Continue reading