Base-Élèves, un outil du coup d'État permanent par Gdalia Roulin 1
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Posted on Friday 27 February 2009, 19h57 - updated on 16/02/12 - Réfléchir - Permalink
Membre du Collectif Saint-Affricain (Aveyron) contre « Base-Élèves » (BE), Gdalia Roulin n’est ni enseignante, ni actuellement parent d’élève. Elle est cependant impliquée dans le Collectif National de Résistance à Base-Élèves considérant que le sort fait à la jeunesse intéresse tous les adultes d’une société et caractérise cette société.
Dans cette réflexion qui prend le temps d’aborder toute la complexité d’un sujet majeur, l’auteure s’interroge au fond sur le type de contrat social souhaitable pour demain.
Le fichage des enfants n’est pas seulement l’aspect d’un problème qui concerne toute la société. Observant la mise en place du fichage de tous les citoyens, en commençant dès le plus jeune âge, au mépris de toute démocratie, Gdalia Roulin montre comment nous sommes entraînés de gré ou de force vers un certain type de société que nous n’avons certes pas choisi, mais qui avance, d’un fait accompli à un autre fait accompli…
Que voulons-nous : l’épanouissement de chaque être humain,
ou nous soumettre à la croyance que les profits monétaires doivent faire la loi ?J’ai toujours été indignée que tout le travail réalisé en psychologie et en pédagogie par de grands chercheurs ou pionniers humanistes ne soit absolument pas utilisé à grande échelle pour favoriser l’épanouissement et le développement optimum des enfants, des jeunes et, pourquoi pas, de tous.
Quelques grands noms sont connus, certes, tels que “Montessori”, “Freinet”, “Illitch” ou “Neill” par exemple. Mais l’institution “Éducation Nationale” n’a jamais accepté de se confronter sérieusement à ces méthodes. Elle a au contraire mis des bâtons dans les roues tant qu’elle a pu contre ceux qui ont cherché à fonder leur pédagogie sur ces conceptions plus ou moins libertaires, axées sur le respect et le développement de l’individu et de sa sociabilité responsable, c’est-à-dire sur la formation de citoyens capables d’auto-organisation. (L’autonomie est même en passe de devenir un délit dans la propagande officielle !!!).
Ce qui me fait dire au passage que si je défends l’école publique et laïque, je crois aussi que pour permettre l’épanouissement des enfants qui lui sont confiés, et préparer une société plus heureuse, il faut la refonder radicalement, dans l’optique de favoriser le développement optimum des potentialités de chacun. État d’esprit complètement différent de la logique de la haute finance qui anime nos édiles actuels, laquelle est complètement égocentrique et prédatrice.
Les “réformes” du gouvernement actuel se font au mépris complet des besoins humains. Cela est très clair vis-à-vis de l’école, c’est tout aussi clair vis-à-vis du démantèlement généralisé des services publics. Que ce soit l’hôpital, la sécu., la poste, les transports, les tribunaux, etc…, ainsi que les délocalisations, tout ne tend qu’à un seul but : produire des profits financiers, pour ceux qui ne savent déjà pas quoi faire de leur argent. (En nous dépossédant hypocritement de ce qui nous appartient collectivement, et que nous devrions pouvoir gérer nous-mêmes directement).
Et par-dessus le marché, on nous explique que cela va beaucoup nous aider, que l’argent des contribuables serve à verser des milliards aux banques (devenues privées comme il se doit !), ou que l’on exonère les entreprises de leurs “charges”… parce que bien sûr, nous, les humbles “travailleurs” et/ou précaires, nous n’apportons pas de chance de relance à cet ordre capitaliste malade (excusez le pléonasme !), et nous devrions uniquement passer notre temps à demander un travail à genoux, sans nous poser la question de son utilité, n’importe quel boulot pour survivre par pitié, et
en comprenant bien la grande misère des entreprises réellement affrontées à une compétition effrénée et délirante où sévit la loi des profits monétaires débridés, ce pour quoi il faut laisser démanteler le code du travail et les conseils de prudhommes, en se laissant fragiliser chaque jour un peu plus, isoler, culpabiliser, surveiller et punir…
Ce qui n’empêchera nullement de nous resservir dans quelques temps la thèse comme quoi, sans l’apport du capital (renfloué aux frais de la princesse sans aucun titre de propriété correspondant), nous n’aurions rien, pas d’emplois, pas de salaires.
Tiens, pendant que j’écrivais, la bonne nouvelle est tombée : Total a fait plus de bénéfices que jamais : 14 milliards d’euros. Merveilleux, non ? De là à ce qu’ils créent des postes de techniciens de surface sur les plages, faut pas rêver, hein !
La pensée dominante veut donc que sans le capital prétendument apporté par les dirigeants, nous ne soyons qu’une bande de bons à rien, incapables de savoir de quoi nous avons besoin et comment faire pour réaliser les biens correspondants et les partager.
Depuis quand l’or se mange-t-il ? Et depuis quand l’or donne-t-il à ses thésauriseurs plus de lucidité qu’aux autres ? Ce qu’il donne, dans notre système social, et ce qu’il permet d’acheter, outre les marchandises, c’est le pouvoir. Et même le pouvoir d’essayer de tout transformer en marchandises, préséances et privilèges.
Tout est là. Comment fait-on ? Quelles initiatives nous laisse-t-on ? Quelle liberté prenons-nous ?
Non, je ne me suis pas éloignée du sujet « base-élève ».
Société sous contrôle hyper-centralisé, ou société d’adultes libres et égaux en droits ?
Le choix est bien entre une société sous contrôle ultra centralisé, où chaque grouillot de base est traité comme un fautif en puissance et cerné en permanence, et entre une société réellement démocratique, où chaque citoyen a voix au chapitre à égalité avec chaque autre individu.Base-Élèves, dans un ordre établi où le pouvoir appelle à la délation, elle aussi monnayable of course, c’est la “délation soft”, la “délation préventive”, anonyme comme la lettre du même nom puisque généralisée, et insipide…
J’ajouterai que les directeurs, sommés de renseigner BE, sont justement dans la situation où ils doivent choisir entre le misérabilisme, la position “échine convenablement courbée”, ou un positionnement clair et mobilisateur en leur âme et conscience, sans oublier que le mimétisme existe, et qu’il s’agit de faire boule de neige en évoluant plutôt vers “l’homo érectus”, tant que possible.
Je remarque aussi que, pour mettre en place ces outils hautement performants, tout cet équipement à travers lequel on veut gouverner machinalement les personnes humaines, on trouve les moyens que l’on prétend ne pas avoir pour maintenir des postes ou des classes…
Et puis, certes, l’administration nous informe aussi peu que possible, et édulcore tant qu’elle peut ce qui est en train de se passer, mais un certain nombre de citoyens ne pourront quand même pas dire, comme en 40 : “On ne savait pas !”. Tous les éléments sont sous les yeux de qui veut bien regarder la réalité et ses responsabilités en face.
Malgré mon indulgence quasi légendaire, je ne suis pas prête à trouver excusable n’importe quelle compromission au prétexte qu’on serait “obligé” de conserver son poste etc…, etc…
Il est un certain nombre d’emplois que je n’aurais accepté sous aucun prétexte, et vraiment, il y en a une longue liste dont les occupants, s’ils avaient bien voulu se reposer de préférence, vaquer à leurs “loisirs”, et en tout cas s’en abstenir, nous auraient rendu un fameux service. Entre les travailleurs de l’armement, ceux des pesticides, du nucléaire, les publicitaires, et j’en passe et des meilleurs, vous vous rendez compte de tout le temps libre que ça dégagerait !
Oui, mais nous risquerions d’avoir le temps et l’énergie de réfléchir, et de devenir trop intelligents, peut-être même contestataires ! Nous risquerions de nous mêler de ce qui nous regarde ! À éviter à tout prix ! Donnez-moi donc plutôt des calmants aux enfants trop turbulents, les labos ont besoin de prospérer !… Ah bon !
Un fonctionnaire est normalement, ordinairement zélé et obéissant.
Un fonctionnaire d’exécution n’a certes pas pour habitude de se poser des questions sur la légalité des ordres transmis par sa hiérarchie. Étant donné que toute l’institution est supposée fonctionner dans le cadre du respect strict de la loi, un simple fonctionnaire n’a même pas à imaginer qu’un ordre illégal puisse lui être donné. Pourtant, depuis l’irrésistible ascension du petit Nicolas, c’est ce qui arrive à peu près journellement. Du fait pourtant du pli d’avoir à “faire confiance” à sa hiérarchie pour l’interprétation et l’application des textes, un directeur est supposé obéir à ses “supérieurs”, et bien évidemment un gendarme ou un policier obéiront strictement aux ordres venus d’en haut. Ce qui se comprend si l’on ne veut pas avoir affaire à de multiples arbitraires, mais ce qui devient très problématique lorsque l’arbitraire s’exerce au plus haut niveau, au point que nous assistons à un coup d’état permanent.
Très concrètement, nous assistons d’ailleurs à la criminalisation de la jeunesse, et de la pauvreté qui se répand comme une lèpre, aux descentes de police musclées, avec chiens, qui se répètent dans les collèges ! J’attends de voir sans y croire, et sans l’espérer non plus, quand les chiens et les gendarmes débarqueront-ils dans les collèges huppés, et pourquoi pas privés, d’ailleurs ? La drogue ne circulerait-elle que dans des milieux défavorisés, dans la basse classe ? Ah, ce n’est pas ce qu’on m’avait dit, au temps où l’on cherchait à comprendre !
Que devient le droit français et sa présomption d’innocence ? C’est ça, la nouvelle pédogogie moderne ? Le règne de la “bonne insécurité”, l’humiliation, la culpabilisation, l’imposition de la force brute, la transformation de chacun en élément anonyme et suspect a priori ? (Quand on fait partie de la “France d’en bas”, bien sûr, celle dont la racaille vole les mobylettes des fils de la Haute !).
C’est ça, la nouvelle pédagogie moderne qui va inspirer les programmes des ordinateurs de gestion des “cohortes” d’élèves ?
Lire la suite (2) : Honnêteté. Une exigence fondamentale !
Texte initialement envoyé sur la liste de discussion du CNRBE (Collectif National de Résistance à Base-Élèves), le 15 février 2009.
Modifications apportées pour Netoyens.info le 27 février 2009.
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